Des corvidés attirés par les maïs

NUISIBLES/ Le point sur les dégâts de corvidés et les moyens de lutte, avec Patrice Prost, membre du bureau de la Fredon* Bourgogne Franche-Comté et de la Fredon-France.

Des corvidés attirés par les maïs

Les dégâts de corvidés dans les cultures sont-ils importants cette année ?

De fortes attaques ont eu lieu sur les semis au mois de mai. Ce fut une catastrophe, principalement dans les tournesols et les maïs, avec un fort impact du point de vue financier pour les maïs semences et pour les éleveurs qui doivent nourrir leurs vaches. Ces attaques correspondent à une période de gros besoins alimentaires des corvidés pour nourrir leurs petits qui se concentrent alors sur une culture, le maïs, dont la sole est en diminution, ce qui accentue encore plus le pourcentage des dégâts.

Cet automne, nous avons vu arriver des hordes de plus de 2 000 corbeaux dans certaines parcelles. Sur ma commune à Dampierre, Il faut remonter 10 ans en arrière pour observer une telle population. Cela ne présage rien de bons pour le printemps…

Comment s’est faite la régulation pendant le confinement ?

Je ne peux parler que de mon expérience personnelle. J’ai pu réguler certaines parcelles en laissant une population d’une trentaine de corvidés. Si je descends en dessous je crains que d’autres groupes ne s’invitent, notamment ceux des villes voisines, comme Saint-Vit et Besançon. La problématique des corvidés est principalement périurbaine. Les maïs semences implantés à Mont-sous-Vaudrey ont également souffert : ils ne sont pas loin, à vol d’oiseau, de Dole. 

On peut dire que les corbeaux font l’inverse des habitants de nos villages : ils passent la nuit dans des « cités-dortoirs » en ville et, la journée, ils viennent à la campagne… 

Comment un agriculteur peut-il lutter contre les corvidés ?

La solution qui donne les meilleurs résultats est la lutte par piégeage avec de petites cages ou des corbeautières. Pour cela il faut être piégeur agréé ou membre de Fredon 39 (anciennement dénommé FDGDON 39) et avoir suivi une formation préalable, dispensée en partenariat avec la fédération de chasse du Jura. 

Pour être efficace, la lutte par piégeage doit s'exercer sur une même zone, trois années de suite, en relevant les cages quotidiennement et en les déplaçant régulièrement. 

 

« Il est important de remplir les déclarations de dégâts en indiquant toutes les espèces », conseille Patrice Prost

Dans le cadre des demandes d'autorisation de destruction des animaux susceptibles d'occasionner des dégâts (ASOD), il est possible également de se faire aider par des chasseurs qui ont reçu la formation Tir de régulation des corneilles noires et corbeaux freux.  Cette demande doit être faite à la DDT. 

Il vaut mieux anticiper, ce n'est pas lorsqu'on a semé qu'il faut trouver du monde ! Cette demande sera valable pendant toute la période de protection des semis. 

Existe-t-il des moyens de lutte alternatifs ?

Les textes nationaux sur la régulation demandent de justifier d’un effarouchement avant d’employer les techniques de lutte. Or les cerfs-volants et les tonne-forts ne sont pas assez efficaces. Il nous faut trouver d’autres solutions. Un travail pourrait se mettre en place entre Fredon BFC et Fredon Grand-Est pour étudier les luttes alternatives complémentaires comme les essais de laser ou de répulsifs au semis.

Quel dernier conseil pouvez-vous donner ?

Les arrêtés préfectoraux de lutte contre les corvidés ont été attaqués l’année dernière par trois associations animalistes. Nous n’avons pas de retour du jugement mais cela montre qu’il est important de remplir les déclarations de dégâts en indiquant toutes les espèces : corvidés, ragondins, blaireaux, fouines, pies… Car tous les trois ans la commission départementale statue pour les classements. Ainsi la pie bavarde est sortie du classement nuisible dans le Jura, - alors qu’elle l’est encore au niveau national -, parce que nous n’avons pas su justifier des dégâts. Nous nous mobilisons, avec la FDSEA, pour que les agriculteurs déclarent bien tous leurs dégâts.

Je pense que nous aurons toujours la possibilité de réguler et de faire intervenir les chasseurs mais nous ne savons pas comment se passera la demande préalable cette année. C’est un point qui reste à éclaircir avec la DDT.

Isabelle Renaut

*Fredon : Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles

En chiffre

En chiffre

En 10 ans, il a été prélevé 14 722 corvidés sur l’ensemble de la Franche-Comté. « Cela représente un pourcentage infime sur une population qui reste stable », indique Patrice Prost. La Fredon identifie par ailleurs des déplacements de colonies. À titre d’exemple, les corvidés qui nichaient dans les platanes à l’entrée de Pesmes se sont déplacés vers le Massif de la Serre.