Chambre régionale d'agriculture
Avenir de la PAC : vaste chantier...

La session tenue par la Chambre d'agriculture de Bourgogne-Franche-Comté, le 26 novembre près de Dijon était la dernière du mandat de Christian Decerle en tant que président. On a tenté d'y définir les grandes lignes de la future PAC : plus simple à dire qu'à faire...

Avenir de la PAC :  vaste chantier...
L'économiste de l'Inrae Cécile Detang-Dessendre s'est livrée à un exercice difficile : ouvrir des perspectives sur la prochaine PAC.

Tenter un début pour finir : voilà, en résumé, la teneur de la table-ronde organisée le 26 novembre chez Dijon Céréales, à Longvic, près de Dijon, dans le cadre de l'ultime session du mandat de la Chambre régionale d'agriculture de Bourgogne-Franche-Comté (BFC). A quelques semaines des élections dans les Chambres d'agriculture, celle de BFC avait choisi de se confronter à un exercice périlleux : imaginer les perspectives qui s'ouvrent pour la future PAC. Pour cela le choix d'une intervenante aux arguments pas forcément consensuels mais qui avaient le mérite de stimuler la réflexion semblait pertinent. C'est l'économiste de l'Inrae Cécile Detang-Dessendre qui a endossé le rôle, sous le regard critique de quatre présidents de Comités d'orientation régionaux : Michel Daguenet (Haute-Saône, élevage laitier), Fabrice Faivre (Côte-d'Or, filières végétales), Didier Ramet (Nièvre, élevage) et Marc Sangoy (Saône-et-Loire, viticulture).

Confrontés à des limites

Pour planter le décor, Sébastien Jeantils  économiste prospectiviste à la Chambre régionale d'agriculture, rappelait que si la PAC a tenté d'impulser une diversification des cultures, les exploitants de BFC sont confrontés aux limites de rentabilité, de matériel, de conduites culturales. Constat était également fait que la PAC échoue à stopper la déprise qui marque le secteur de l'élevage allaitant, que la course à la performance en élevage laitier laisse beaucoup de gens sur le bord du chemin et qu'en viticulture, les prix du foncier laissent craindre, à terme, une perte de souveraineté par rapport à un outil de production peu à peu accaparé par des fortunes étrangères. Le dialogue stratégique européen présenté début septembre, et qui porte sur les orientations futures de la PAC, ambitionne de  promouvoir une alimentation saine et durable, mais il devrait aussi se fixer des objectifs de rapprochement entre producteurs et consommateurs. Sacré défi ! Michel Daguenet ne manquait pas de rappeler que le premier objectif de la PAC devrait être le revenu agricole : « Elle devrait faire effet levier pour les exploitations, quand le premier challenge c'est de maintenir le revenu, mais on oriente, au mieux, à la marge. Au lieu d'un levier, on a une béquille... » Fabrice Faivre estimait pour sa part utile d'orienter la PAC « vers une souveraineté alimentaire européenne, autour des protéines par exemple. Monter des ateliers de viande blanche dans nos régions, ça consommerait de la céréale locale. Il faut accompagner les producteurs de viande blanche. »

Faire de l'environnement sans s'en donner les moyens

Des constats qui collent mal avec les objectifs de la PAC 2023-2027 rappelés par Cécile Detang-Dessendre, où se mêlent la nécessité d'assurer un revenu équitable, de préserver les paysages et la biodiversité, mais aussi de soutenir le renouvellement des générations ou d'accroître la compétitivité. « On a voulu faire de l'environnement mais sans donner les moyens et en complexifiant le système », constatait l'économiste de l'Inrae. Résultat : personne n'est satisfait, ni les transformations environnementales ni les revenus agricoles ne sont pas au rendez-vous. Le problème, pour Cécile Detang-Dessendre, c'est que « le dialogue stratégique européen met sur la table tous les points à aborder... mais sans les hiérarchiser. Il faut réfléchir à l'amélioration des outils de soutien direct afin de revoir les bases de calcul des aides découplées, les mécanismes de redistribution sont peut-être à revoir, il faudra aussi remettre à plat les aides contracycliques... car le changement du système des aides directes est clairement mis sur la table pour la prochaine PAC. » Pour autant l'économiste de l'Inrae est claire : « on ne peut pas dire qu'on ne va rien changer, face à l'urgence climatique. Je suis convaincue que les agriculteurs doivent être rémunérés pour leurs productions, mais aussi pour les services environnementaux réalisés. Produire du paysage, c'est une production, à condition de réorienter des aides. » Ce à quoi Didier Ramet rétorquait : « Ok, mais il faudra inventer des revenus extérieurs et le revenu environnemental n'en n'est pas un. Si on veut faire de l'environnement, il faudra un budget supplémentaire et pas une répartition différente du budget existant. » Surtout que, fondamentalement, tout cela devra reposer sur une vision et des orientations politiques claires et non pas, comme concluait Cécile Detang-Dessendre « une main droite qui fait la PAC et une main gauche qui fait des accords commerciaux. » Tiens ? Revoilà le Mercosur...

 

Berty Robert

Le débat avec les représentants du monde agricole n'a pas toujours été simple mais il avait le mérite de stimuler la réflexion.