En ce début d’année 2024 en Franche-Comté, le seuil des 200 C jours, repère du premier apport d’azote sur les prairies va être atteint en plaine. Même si les pluies abondantes de cet hiver ont lessivé une bonne partie de l’azote, attendre des bonnes conditions de passage reste le plus important.
Un apport d’azote minéral ou de lisier, dès les 200°C cumulés (en base 0°C) depuis le 1er janvier, permet de maximiser la production d’une prairie de graminées au premier cycle. « C’est un des modèles les plus incontestables », reconnaît Emeric Courbet, technicien à la CA70. Contrairement aux céréales à paille, il n’existe en effet pas de stade physiologique « repère » permettant de positionner les apports d’azote sur prairies. Le démarrage de la croissance de l’herbe se raisonne en fonction d’une somme de températures en base 0°C depuis le 1er janvier de l’année. Des travaux conduits par ARVALIS sur la fertilisation des prairies à base de graminées ont solidement établi qu’un premier apport d’azote (sous forme minérale ou lisier) réalisé à 200°C jours assure une production fourragère de qualité dès le premier cycle de la culture. Le site web https://www.syngenta-pro.fr/degres-jour permet de calculer facilement ce stade-repère en fonction de la localisation.
200°C jours offre le meilleur compromis entre un apport trop tardif, synonyme de ralentissement de la croissance et de moindre production d’herbe au printemps et un apport trop précoce qui perdrait en efficacité par pertes en volatilisation ou dénitrification.
Un repère thermo-temporel
Cette règle des 200°C cumulés s’applique dans toutes les régions. Elle est valable pour une dose appliquée inférieure à 100 kg N/ha et quel que soit le mode d’exploitation (pâturage, ensilage, enrubannage, foin). En prairies installées, les fournitures d’azote par le sol sont globalement faibles en sortie d’hiver. L’apport d’azote à 200°C permet ainsi de faire coïncider une disponibilité suffisante de l’élément pour les plantes dont les besoins sont importants et croissants.
Depuis 20 ans, les pratiques de fertilisation azotée sur céréales à paille ont beaucoup évolué : les apports initialement concentrés début montaison se sont progressivement étalés jusqu’à mi-montaison, voire fin montaison. Cette pratique se justifie par la recherche du meilleur compromis rendement en grains / teneur en protéines, qui n’est pas proportionnel à la biomasse produite en début de cycle. Sur prairies, le raisonnement est très différent : l’objectif de la fertilisation azotée est ici de maximiser la production de biomasse. La satisfaction précoce des besoins azotés permet ainsi la croissance maximale de chacune des talles émises.
Les conditions de portance sont déterminante
Avant tout apport, il convient bien évidemment de vérifier la réglementation locale en vigueur (Directive Nitrate), en particulier dans les zones précoces. Il importe également d’être vigilant quant à la portance des sols. Avant tout apport, et notamment de produits organiques résiduaires à l’aide d’équipements lourds, il convient d’observer une période de ressuyage suffisante. En conditions ennoyées, l’azote n’étant pas le facteur limitant de la croissance des plantes, la priorité sera donnée au ressuyage.
Enfin, les prévisions météorologiques peuvent constituer une aide au positionnement des apports. En cas de fort gel annoncé, l’apport peut être décalé afin de coïncider davantage avec le redémarrage de la végétation. L’effet sur le rendement d’un décalage de l’apport à 300°C reste globalement faible.
Date N’Prairie permet de planifier le premier apport
En valorisant des données météos actualisées tous les jours, Date N’Prairie est un outil qui utilise la règle des 200°C pour apprécier la précocité ou la tardiveté de l’année dans sa région. Il s’agit d’un site web accessible librement et gratuitement depuis un smartphone, un ordinateur ou une tablette. Il suffit à l’utilisateur de renseigner son code postal pour obtenir sa date d’apport. Les calculs sont réalisés à partir des données de la station météo la plus proche fournies par Météo France. L’outil est accessible sur mobile, tablette et ordinateur.
Evidemment, le premier apport d’azote sur une prairie devra être réalisé si les conditions de portance le permettent et dans le respect des règles fixées par la Directive Nitrates.
Anthony Uijttewaal (Arvalis - Institut du végétal)