Un bleu de Gex artisanal et traditionnel

Depuis son installation en 2008, Florent Jacquiot fabrique à la ferme de la tomme et de la raclette. « J’ai toujours voulu transformer le lait, c’est agréable de partir de zéro et d’arriver à un produit fini, » explique-t-il. Rejoint en 2019 par sa compagne Delphine Janvier, ils élèvent 56 vaches croisées montbéliardes et simmental. Le lait est livré à la fromagerie de l’Abbaye mais une petite partie de la production est transformée à la ferme. « L’idée de nous diversifier est venue en pleine crise du covid pour éviter de jeter le lait », raconte Delphine. Le couple lance alors un fromage à pâte pressée, qu’il nomme Poizati et décide de se lancer dans la fabrication de bleu de Gex Haut Jura. « C’est aussi un moyen de renouer avec la tradition familiale puisque le grand-père de Florent, fromager aux Granges, faisait déjà du Bleu ».

Un secret de fabrication bien gardé

Trouver la recette de fabrication n’a pas été aisé car les producteurs gardent précieusement leurs secrets mais Florent a rencontré un vieux fromager à la retraite qui l’a aiguillé et aidé lors des tests. « Les premiers essais ont été un succès mais ceux de l’été, avec la chaleur, ont été plus compliqués. Malgré tout, nous nous sommes accrochés et avons reçu notre agrément durant l’automne 2021 ». Si la fabrication a débuté dans un chaudron en cuivre, les éleveurs-fromagers ont depuis fait réaliser une cuve sur mesure qui leur permet de faire six meules à la fois. Du brassage au repiquage pour apporter de l’air, le fromage est entièrement fait à la main. Ne reste plus qu’à affiner les fromages dans la cave, 21 jours minimum. « Nous ne l’aimons pas trop blanc et crayeux, » précise Delphine. Si l’affinage dépasse les 60 jours, il a droit à l’appellation Pérachu.

La reine du troupeau

Autre particularité de cette exploitation, elle est la seule du massif du Jura à élever une trentaine de vaches d’Herens pour leur viande, vendue à la ferme en caissette ou transformée en saucisson. Ces vaches originaires des Alpes suisses, petites et trapues, de couleur allant du rouge foncé au noir, ont la particularité de lutter entre elles pour déterminer la hiérarchie du troupeau. Tous les 1er mai, de nombreux spectateurs viennent assister à la mise en herbe des animaux.

Front contre front, chacune pousse jusqu’à ce que l’autre recule. La plus forte devient « la reine », boit en premier et décide de l’endroit où le troupeau mange. Durant tout l’été, des outsiders cherchent à la détrôner. « C’est une épreuve de force, elles ne se font jamais mal, » précise Delphine. « Entre deux matchs, ce sont des animaux très doux et attachants. Au départ, c’était la passion de Florent, c’est devenu notre passion commune ». Le couple emmène chaque année leurs vaches participer à quelques compétitions et aux rencontres internationales de Chamonix à l’automne.

Sébastien CLOSA

(source : © Magazine Saveurs gourmandes du Jura - 2022 - Photo : ©Genée Jérôme)